La Fedil encøre

d'Lëtzebuerger Land du 12.09.2025

La Fedil a organisé la troisième édition de son Industry Day mercredi après-midi dans la boîte de nuit du Chouchou, baptisée Encøre. Cet événement s’institutionnalise et annonce dorénavant « la rentrée », selon Lex Delles (DP), enseignant de métier devenu professionnel de la politique. Le ministre de l’Économie est l’invité traditionnel de ce rendez-vous du lobby industriel né en 2023. Pour la première édition pendant le Superwaljoer, le ministre Franz Fayot (LSAP) était tombé dans le guet-apens de Kikuoka. Dans les salons de l’hôtel Mercure, le ministre socialiste et ses collègues écologistes avaient été jugés responsables de la non-installation au Luxembourg des Google, Fage et Knauf… le tout sous l’œil de Luc Frieden, seul Spëtzekandidat présent.

Ce mercredi, le ministre de l’Économie (un libéral) a été la cible d’une pique (celle-là amicale) de la part du président de la Fedil, Georges Rassel, dans la partie remerciements de son discours introductif : « Merci à Lex Delles d’arriver tardivement comme à son habitude, pour clôturer l’événement. » Bien informé (puisqu’il n’est effectivement arrivé qu’en milieu d’après-midi), le ministre répondra en conclusion que son absence tenait à sa présence à une réunion au ministère des Finances pour défendre des investissements qui serviront l’industrie luxembourgeoise. Parmi ceux-ci pourraient d’ailleurs figurer l’acquisition du site dudelangeois délaissé par Liberty Steel en faillite pour y développer des activités dans le domaine de la défense. L’initiative a été validée le 22 juillet par le conseil de gouvernement. Elle exige maintenant une réponse du curateur, « assez vite », espère le ministre Delles, parce que des « dizaines voire des centaines de millions d’euros » vont abonder le secteur et le gouvernement apprécierait qu’ils profitent à l’économie nationale.

En ce jour d’incursion de drones russes au-dessus de la Pologne, membre de l’Otan, et de bombardements israéliens sur le territoire qatari, les turbulences du monde étaient mises à l’honneur… « Global shifts, local strategies : how industry can turn trade disruptions into opportunity », tel était le thème choisi quelques semaines plus tôt. S’est ajoutée une forte dimension européenne en la présence de Fredrik Persson, président de BusinessEurope, un lobby rassemblant 42 fédérations de 36 pays européens. « We are your boys in Europe », a clamé le lobbyiste à ses membres luxembourgeois, prêchant « l’unité et l’urgence » pour « libérer la créativité de nos entreprises » empêtrées, dit-il, dans un maelström réglementaire depuis de trop nombreuses années. « Mais on voit des signes positifs à Bruxelles. Les commissaires ont pris conscience », a-t-il témoigné le jour où leur cheffe, Ursula von der Leyen, a parlé du « combat » de l’Europe pour de son discours sur l’état de l’Union.

Sur le grill en ce jour de barbecue de la Fedil (comme le fera remarquer Paperjam), la représentante de la Commission européenne à Luxembourg, Anne Calteux, a fait valoir « la prévisibilité » recherchée par l’exécutif européen, notamment en signant avec Donald Trump un accord commercial outrageusement à son avantage (avec un droit de douane de quinze pour cent sur les marchandises européennes). Un mauvais deal serait mieux qu’une guerre commerciale. Puis cet accord ne marquerait que « le début » des tractations durant lesquelles l’UE devra se montrer « flexible », selon Anne Calteux. Le représentant de BusinessEurope demande incessamment la multiplication des accords commerciaux entre l’UE et des grands pays tiers comme l’Inde pour limiter la dépendance aux États-Unis et à la Chine. La représentante de la Commission le lui promet, sans s’engager sur les délais. Puis elle rassure : « Il y a trop de règles, on a compris ». S’émanciper du corset de l’unanimité pour faciliter la prise de décision est une autre proposition de la Commission UvdL. Dans ce panel, deux voix « discordantes » se sont fait entendre. La nouvelle country manager d’ArcelorMittal, Valérie Massin, a demandé à ce que l’UE se protège de l’acier ou des produits chimiques en provenance de pays tiers qui ne respectent pas les normes demandées aux entreprises européennes. Le membre du comité de direction de Ceratizit, Frank Thomé, a regretté l’omnipotence de la Chine ou des États-Unis sur les chaînes d’approvisionnement des entreprises européennes, mais a en même partagé sa satisfaction que son groupe, au sein de Plansee, ait pris les devants pour juguler l’une (tariffs trumpiens) ou l’autre (hégémonie de la Chine sur le tungstène) turbulence. La lutte contre le réchauffement climatique a, elle, été rappelée par le ministre Lex Delles.

Pierre Sorlut
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